Nippon Ichi est le maître du TRPG au Japon. Leur dernière production en date est Phantom Brave, et c'est leur deuxième jeu à avoir franchi nos frontières (le premier étant Disgaea), grâce à l'éditeur Koeï, que je ne remercierai jamais assez ! Phantom Brave est un bijou tactique, complexe et passionnant.
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Les fans de Disgaea vont vite être déçus par le manque flagrant d'humour de Phantom Brave. On se souvient de certains moments hilarants dans Disgaea, complètement absents dans Phantom Brave. Certes, dans ce dernier on sourit quelques fois grâce aux clins d'oeils à d'autres jeux ou films, mais le scénario est plutôt basé sur les émotions tristes : maladie, souffrance et autres sacrifices. On a donc une vraie histoire avec un vrai méchant, même si les prétextes pour livrer batailles sont assez classiques.
Marona, une petite fille aux cheveux verts (sic), est une Chroma. En gros, c'est une sorte de chasseur de primes qui fait des missions à droite à gauche pour gagner des sous. C'est au travers de ses yeux, et ceux de son fantomatique ange gardien, Ash, que nous découvrons le monde d'Ivoire, haut en couleurs et graphiquement très varié. Marona possède la faculté de voir et d'invoquer des fantômes (d'où son appellation de « possessed girl »), et tout le jeu est basé sur cette faculté. Pour remplir les missions et vaincre ses ennemis, elle devra invoquer un petit bataillon de fantômes, car la pauvre fillette est bien faible toute seule. D'ailleurs elle vit sur une petite île, où seront présents pratiquement tous les fantômes créés. La diversité et le nombre de ceux-ci confèrent paradoxalement à l'île une sensation de chaleur graphique et une impression de vie incroyable !
L'univers de Phantom Brave est très travaillé. Ivoire est composée de plusieurs îles, caractérisées par des palettes graphiques et des personnages bien particuliers. Ils joueront un rôle dans le scénario à plus ou moins long terme, et ils sont tous attachants, voire très charismatiques pour certains. On remarque d'ailleurs l'évolution de leur opinion envers Marona au fur et à mesure de l'avancement du scénario et des exploits réalisés par cette dernière.
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Les autres productions de Nippon Ichi ne sont pas des merveilles techniques poussant les capacités de la PS2 à son maximum, loin de là, et Phantom Brave ne fait pas d'exception. Néanmoins, lors des phases de dialogues, les dessins 2D sont vraiment magnifiques, que ce soit pour les décors ou les personnages mis en scènes. Un vrai régal pour les yeux où détails riment avec couleurs chatoyantes. Pour les batailles, c'est une autre histoire, la 3D est basique, à la limite de la PSX. Ca peut surprendre au départ mais on s'y fait, surtout que les effets spéciaux sont gigantesques et très bien mis en scène. De toute façon, ce jeu n'est pas là pour concurrencer les grosses productions misant tout sur la réalisation, tout son charme et sa puissance se trouvent dans les possibilités tactiques du gameplay.
Les batailles sont le nerf du gameplay tactique. Tout est prétexte pour se battre, un personnage à rencontrer ? Trois ou quatre batailles pour pouvoir l'aborder, plus une où on doit l'affronter ! Les combats se déroulent au tour par tour, avec un enchaînement des personnages selon leur rapidité, un peu comme dans Final Fantasy X. Dans un tour, tout est libre. Même le système de case inhérent aux TRPG à été supprimé, on peut aller partout (dans les limites de la caractéristique « Move »), se positionner comme on veut et où on veut. On peut aussi attaquer (une seule fois par tour, contrairement aux déplacements) ou lancer une magie, d'ailleurs c'est le même menu pour les attaques normales (zéro points de magie) et les attaques spéciales ou magiques. Ces attaques sont réparties en plusieurs classes, et chaque classe de fantômes possède ou non des affinités avec ceux-ci.
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Les sortes d'armes sont très variées. En fait, tout sur le champ de batailles peut servir d'arme : de l'étoile de mer, à l'arbre cramé, en passant par la massue, la fleur fanée ou la grosse hache de bourrin. Ce qui est excellent, c'est que tous les personnages qui prennent part à la bataille (Marona et ses fantomes, ainsi que les monstres) peuvent s'équiper de ces armes (une seule a la fois) et utiliser les attaques associées à celles-ci. Mon arme s'est fait détruire par l'attaque précédente ? Pas grave, j'ai repéré un bon gros rocher près de moi, je vais le prendre et l'envoyer à la tête du monstre ! De plus, s'équiper avec une arme, augmentera certaines caractéristiques, mais en baissera d'autres ! Par exemple, s'équiper d'un rocher augmentera grandement sa défense, mais baissera aussi sa vitesse, ou s'équiper d'une grosse hache augmentera son attaque mais baissera son intelligence (qui a dit pour les gros bourrins ?). Il vaut mieux donc équiper un magicien avec un livre de magie et une valkyrie avec une bonne lance, que l'inverse. Un système complètement génial donc, même si on ne peut s'équiper que d'une arme à la fois (imaginez Ash avec une Héliotrope dans chaque main, argh), et que les armures, casques et autres accessoires sont absents.
Pour en revenir aux combats, les fantômes sont invoqués (par la commande « Confine ») dans ces fameux objets/armes, c'est-à-dire que si le champ de batailles comporte peu d'armes, on ne pourra pas invoquer beaucoup de fantômes. Il y a bien sur une limitation d'invocations, située à quatorze entités. Une entité peut être un fantôme, mais aussi une arme, donc invoquer un fantôme portant déjà une arme coûte deux entités et un fantôme sans arme, une seule bien sur. L'autre point très tactique du jeu est le fait que vos combattants fantomatiques possèdent une caractéristique « Remove » qui détermine le nombre de tours où ils peuvent rester sur le champ de bataille. Par exemple, Ash peut bouger et attaquer pendant 5 tours avant de retourner dans le monde des morts, et une sorcière seulement 3 tours ! Les combats deviennent vite des vrais casses têtes (surtout si la carte est grande et que le boss se trouve à l'autre bout) et on y réfléchit à deux fois avant d'invoquer les personnages les plus forts, car se retrouver devant un dragon niveau 80 avec une Marona niveau 40 et deux boulets niveau 25 est vite arrivé ! Enfin un fantôme qui retourne dans sa dimension peut emmener avec lui, avec un certain pourcentage selon la classe, l'objet dans lequel il a été invoqué. C'est de cette manière (autre que la voie du marchand) que l'on gagne des armes.
Les batailles sont donc très tactiques, avec la gestion des armes et des points de remove, on ne s'ennuie pas une seule seconde. Mais j'ai envie de dire que tout ceci n'est rien comparé aux possibilités offertes lors des phases de gestion entre les batailles.
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Ces phases de gestion se déroulent sur l'île aux fantômes où Marona vit. On y voit tous nos combattants, ainsi que les armes, disséminées ça et là. Libre au joueur (qui contrôle Ash, suivi de près par Marona) de leur parler, de les taper, de les attraper pour les lancer où bon lui semble (certains bonus situés en hauteur ne sont accessibles qu'après avoir fait une pile d'armes et de gars). La population de l'île est limitée à cinquante entités (encore une fois, personnages et armes) mais on peut les stocker et les invoquer comme on veut par l'intermédiaire de Marona. Cette dernière nous propose aussi de créer de nouveaux fantômes récupérés à la fin de certaines batailles. Ces fantômes, selon leur classe, proposent eux aussi des services, comme l'association de titres qui modifient les caractéristiques des entités, la réorganisation des magies et attaques spéciales, l'achat et l'amélioration d'armes et j'en passe (je vous un peu laisse la surprise aussi, sinon c'est pas marrant). J'ai gardé les deux plus importants pour la fin : la fusion et les donjons aléatoires.
Commençons par la fusion que nous propose la « Fusionnist » (original tiens). A partir de ce menu, on peut fusionner deux entités, armes et/ou fantômes (oui on peut fusionner un personnage avec une arme et même deux personnages !). Même si la deuxième entité disparaît, la fusion permet d'augmenter les caractéristiques de la première et de lui associer des pouvoirs. De cette manière on peut diminuer le malus de vitesse d'un rocher en le fusionnant avec une épée courte, ou augmenter la force d'une lance, en la combinant avec une hache. On peut aussi faire apprendre des magies aux éléments différents (feu, glace, vent) à des sorcières en les combinant, et je peux vous dire qu'une sorcière qui sait lancer des « giga fire », « giga ice » et « giga wind » est très utile, car un monstre résistant au feu est sensible à la glace et inversement. Les possibilités sont infinies et on passe des heures à réfléchir et à tester les fusions pour trouver le meilleur équilibre.
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On peut ensuite se lancer dans un donjon aléatoire, créé de toute pièce par un « Monk » (et pas un « Dungeon Creator » arf). Les statistiques du donjon sont aléatoires, que ce soit au niveau des levels moyens des monstres, de leur type et de leur nombre, du nombre d'étages, de la surface du terrain ou encore des contraintes. On ne se retrouve jamais avec deux donjons identiques et la lassitude ne se fait pas trop sentir. A noter que des évènements (aléatoires eux aussi) surviennent à certains étages, comme la rencontre avec des ennemis puissants mais tous endormis au début, ou des guerres entre clans jaune et rouge (Marona doit tuer les rouges, les jaunes nous aident... des fois). Bref c'est terrible, surtout pour le level-up !
On se surprend à passer énormément de temps sur cette île, sans faire avancer un seul instant le scénario, et le pire c'est qu'on s'y plait !
Vous l'aurez compris ce jeu est gigantesque, au niveau des possibilités tactiques, mais aussi de la durée de vie. Rien que l'histoire principale prendra une quarantaine d'heures pour être achevée si on ne se presse pas, et les quêtes annexes sont démentes par leur difficulté (comme Disgaea) et il faudra de nombreuses heures de level-up dans les donjons aléatoires pour pouvoirs vaincre les boss cachés qui sont géniaux, je dois avouer, mais pas de spoil !
Une réussite en tout point.
Zeus
Concepteur | Editeur | Machine | Version testée | Difficulté |
Nippon Ichi | Koei | Playstation 2 | PAL | Moyenne |
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Réalisation | 14/20 | On ne peut pas dire que c'est le point fort du jeu, mais la beauté de la 2D rattrape tout le reste. Certains effets de lumière sont aussi convaincants. |
Jouabilité | 19/20 | Presque parfait ! Le gameplay est un des plus complets que j'ai vu pour un RPG-Tactique, tout y est bien pensé. Attention il faut cependant un temps d'adaptation. |
Musiques | 15/20 | Joyeuses ou mélancoliques, on trouve de tout et de qualité inégale. |
Durée de vie | 16/20 | L'aventure principale se termine assez rapidement, contrairement aux quêtes annexes où il faudra s'entrainer jusqu'à des niveaux ahurissants pour pouvoir progresser, mais c'est si bon... |
Scénario | 14/20 | Très classique, mais ça ne gène pas du tout l'envie d'aller plus loin et de découvrir l'histoire des personnages secondaires complètement loufoques. |
Plaisir de jeu | 18/20 | Chaque affrontement offre son lot d'emerveillements tactiques, c'est génial. |
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Note Globale | 17/20 | Le meilleur RPG-Tactique après Final Fantasy Tactics, tout simplement. Une petite merveille comme on aimerait en voir souvent ! |
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