Si un jour on m'avait dit que Baten Kaitos sortirait en Europe, jamais je ne l'aurais cru. Et pourtant, depuis le 1er Avril 2005 nous pouvons nous extasier devant ce titre. Et qui plus est en Français, comme quoi Nintendo ne fait pas les choses qu'à moitié. La production des studios Monolith Software et Tri-Crescendo dépasse les standards du genre pour nous proposer une aventure extraordinaire qui fera date dans l'histoire du RPG.
![]() |
![]() |
Baten Kaitos ressort le concept de "God RPG", soit RPG divin, qui avait été touché du doigt par Actraiser (jeu Super Nintendo). Vous incarnez un ange gardien qui aura pour rôle de conseiller et de soutenir (ou pas) le personnage principal nommé Kalas. Ce dernier vous demandera toujours votre avis dans les situations les plus délicates, à vous d'être en accord ou pas avec lui, ce qui devrait amener à deux fins radicalement différentes si vous êtes toujours sur la même longueur d'onde ou, au contraire, si vous n'arrêtez pas de la contredire. Ce concept est vraiment original car il permet quelques subtilités scénaristiques non négligeables aux moments forts du jeu. Le fait de voir l'action en tant qu'ange gardien est vraiment bien pensé car on s'attache assez vite aux personnages, tous aussi surprenants les uns que les autres.
Parlons un peu de l'histoire maintenant. Ecrite par le scénariste de Chrono Cross et Xenogears, elle déçoit un peu par son manque de folie et de gros rebondissements, car l'auteur nous avait habitué à des scénarios de dingue (notamment les jeux cités au dessus) et Baten Kaitos possède un scénario vraiment très (trop?) classique! Voyons plutôt de quoi il en retourne. Le jeu débute dans un petit village où l'on découvre Kalas, au travers des yeux de l'ange gardien. Ni vous, ni lui, ne se souvient des évènements passés, apparemment Kalas s'est évanoui dans la forêt de Fourbelune et il a été trouvé et ramené par un petit animal du coin. Kalas ne va pas tarder à rencontrer l'héroïne du jeu : Xehla. Après quelques heures de jeu, vous découvrirez ce qui la motive: la récupération de cinq parties du dieu maléfique Malpercio pour éviter qu'elles ne tombent entre de mauvaises mains. Ces mains sont celles de l'empereur Geldoblame, dictateur de l'île de l'Empire qui possède la plus grosse puissance militaire, qui cherche à rassembler les cinq parties pour obtenir la puissance divine. Le monde de Baten Kaitos est divisé en cinq îles principales qui flottent dans le ciel. Il vous faudra explorer toutes ces îles pour essayer de prendre les magnus ultimes associés à chaque partie du corps de Malpercio.
Magnus ? Qu'est ce que c'est ? Un magnus est une carte qui renferme un objet du monde de Baten Kaitos. Cet objet peut-être tout et n'importe quoi, une épée, une fleur, une armure, un bout de fromage, ou encore un morceau du corps d'un dieu du mal. En fait, les magnus sont l'essence du monde, ce qui le fait tourner et le maintient en vie. Le jeu est basé sur ce principe, tous les objets transportés par l'équipe sont des cartes magnus, lors de la libération d'un magnus, l'objet contenu apparaît devant celui qui l'a invoqué, qui peut ensuite s'en servir. Ce principe régit les combats et les quêtes, mais nous y reviendrons.
Nous remarquons donc que l'univers du jeu est bien plus travaillé que la trame du scénario elle-même et nous pouvons en dire autant pour les personnages. En effet ces derniers sont exceptionnels de profondeur et nous réservent tous des surprises de taille (bien plus fortes que le scénario). Kalas est un des personnages de RPG les plus tourmentés, Xehla cache bien son jeu, Savyna garde un lourd secret, Mizuti n'est pas forcément celui que l'on croit, et j'en passe. Vraiment le point fort de l'histoire : ses personnages.
![]() |
Baten Kaitos est un jeu GameCube, et dès le premier écran, cela se voit ! Il me semble ne jamais avoir vu un tel degré de détails dans les décors, c'est parfait tout simplement. Les décors sont en 2D, avec des personnages en 3D qui s'intègrent sans problème dedans. Passé la claque de la finesse, on tombe devant l'animation. Pratiquement chaque élément de l'écran est animé : les feuilles qui bougent, l'eau qui coule, les nuages qui passent, la neige qui tombe, les drapeaux qui flottent selon le vent. Rien ne sera plus pareil après avoir vu la capitale de Diadem (l'île aux nuages) et son château perdu dans la beauté des nuages rosés. Cela laisse rêveur... Quant aux combats, ils sont en 3D, décors comme combattants. On baisse d'un cran au niveau de la complexité des environnements, mais cela reste très joli et agréable. Les effets spéciaux sont très bien rendus, sans être réellement époustouflants comme un Final Fantasy, mais pas vraiment de choses à lui reprocher de côté-là.
![]() |
Comme vous devez sûrement le savoir, les combats de Baten Kaitos se déroulent avec les cartes magnus. Chaque combattant possède un Deck de plusieurs dizaines de cartes (20, 30, 40, 50 ou 60 selon la classe, mais on y reviendra). Ce deck est modifiable à partir du menu du jeu. Il comprend des cartes d'attaque représentées par l'arme du personnage (épée pour Kalas, sort pour Xehla et Mizuti ou encore des instruments de musique pour Lyude), des cartes d'armures pour la défense, des cartes de soins et d'autres cartes diverses et variées, comme par exemples des cartes qui empoisonnent ou qui augmentent l'attaque. Le choix est vaste puisque pas moins de 1022 cartes magnus différentes peuvent être récupérées au cours de l'aventure! A noter que l'ordre des cartes du deck n'est pas pris en compte dans les combats puisqu'elles sont mélangées aléatoirement à chaque affrontement. Lorsque votre deck sera prêt, vous pourrez affronter vos ennemis comme il se doit. Les combats se déroulent au tour par tour, en commençant par celui qui a le plus d'agilité. Les affrontements se font au un contre un, c'est-à-dire que vous ne pourrez pas blesser plusieurs ennemis en même temps, mais seulement celui que vous avez choisi, et inversement, un ennemi ne pourra pas toucher votre groupe entier mais seulement un personnage à la fois.
Votre deck servira donc à attaquer ou régénérer un ami lors du tour de votre combattant, et à défendre lorsque vous vous ferez attaquer. Ces deux phases (attaque et défense) fonctionnent de la même manière, vous sélectionnez un enchaînement de cartes au fur et à mesure que l'action se déroule, en gardant à l'esprit qu'une carte grisée finit une attaque et ne compte pas dans la défense (logique). Donc utiliser une armure en plein enchaînement d'attaques l'arrêtera tout simplement. Votre deck est toujours visible en bas de l'écran, et une nouvelle carte inconnue viendra remplacer celle utilisée (à part s'il ne vous reste plus de carte dans le deck bien sûr). Ceci amène un important facteur chance dans les combats car le mélange des cartes est aléatoire et on ne sait jamais quelle carte arrivera par la suite. Cela peut amener à des situations délicates si on avait prévu un enchaînement d'épées et que l'on se retrouve avec seulement des armures ou des cartes de soins qui arrivent dans la pioche active. Les combats sont donc assez stressants et il faut toujours être concentré sur notre jeu pour ne pas avoir de mauvaises surprises, comme soigner un ennemi, car ça peut vite arriver dans le feu de l'action.
![]() |
La comptabilisation des dégâts est assez spéciale, mais géniale. Un écran en fin d'enchaînement viendra nous donner toutes les informations nécessaires sur les dégâts. On y voit le total des dommages infligés, le total de défense, ainsi que les dégâts reçus (qui sont le total des dommages - le total des défenses), le tout regroupé par éléments, ou plutôt par catégories d'éléments. Je m'explique, il y a 6 éléments magiques qui s'opposent deux à deux. Le feu s'oppose à l'eau, le temps au vent et l'obscurité à la lumière. Ils s'opposent mais aussi s'annulent. Si on fait 200 dégâts d'eau et 50 dégâts de feu (par deux armes différentes), on n'aura infligé que 150 dégâts d'eau (200 d'eau - 50 de feu) et pour peu que l'ennemi utilise une protection de 50 en eau, on n'infligera plus que 100 dégâts d'eau. Il y a donc, dans l'écran des dégâts, quatre lignes, une pour les dégâts physiques sans élément et trois autres pour chaque catégorie d'éléments. A noter que les ennemis ont des affinités avec les éléments et il n'est pas rare de voir des ajouts ou des retraits de dommages lorsqu'on les attaque. Un monstre des ténèbres réduira de 80% ses dommages de l'élément obscurité mais inversement, augmentera ses dégâts de 80% lorsqu'on le touchera avec un élément lumière. Ce système est vraiment génial car on sait exactement quels dégâts on fait mais aussi pourquoi. Mais les possibilités ne s'arrêtent pas là, car on peut faire des combos de cartes (aussi bien en attaque qu'en défense, je le répète le système est similaire). Vous aurez tous remarqué les petits chiffres sur les angles des cartes. Ils servent à faire des combos. Il existe deux types de combos : les paires et les suites. Les paires consistent à sortir des cartes de même numéro, sachant qu'au plus un numéro sort, au plus le combo sera puissant. Quatre cartes avec le numéro 8 et deux cartes avec le numéro 2 sont considérés comme un combo de paires, par contre une carte 2 et cinq cartes 8 n'est pas un combo. Enfin le combo suite est le plus puissant car le plus dur à sortir. Il faut aligner dans l'ordre croissant ou décroissant une suite de chiffre, le plus grand combo étant une suite de neuf chiffres : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9 (ou décroissant), très rare mais très puissant car le combo augmente de 300% les dégâts infligés! Vos combos sont inscrits dans l'écran des dégâts, ainsi que le pourcentage d'augmentation des dégâts attribué à ceux-ci. On retrouve aussi des combinaisons de cartes qui aboutissent à des combos SP. Ces derniers permettront de "fabriquer" une carte inédite que l'on pourra récupérer en fin de combat. Par exemple un magnus lait enchainé avec un magnus fraise donnera un magnus lait fraise, ou encore une coupole de Graal et du vin de riz donnera du vin sacré. Il existe 141 combos SP dans le jeu, plus ou moins utiles.
L'évolution de la puissance de nos combattants est assez originale car divisée en deux parties : le niveaux et la classe. Les niveaux s'acquièrent avec l'expérience des combats et permettent d'augmenter les caractéristiques comme la force ou la défense du personnage. Les augmentations de classes sont plus rares (il y en a six pour chaque combattant), car il faut trouver le bon objet (magnus) pour pouvoir changer de classe. Elles permettent d'avoir plus de cartes dans son jeu, de voir plus de cartes dans le bas de l'écran (donc plus de choix pour les enchaînements) et de pouvoir enchaîner plus de cartes à la suite, avec neuf cartes au maximum lorsque l'on atteint la classe 6. Le point noir c'est qu'à chaque changement de classe, le temps pour choisir sa première carte en combat baisse. Au début du jeu on a un temps illimité pour entamer un enchaînement, puis le temps se restreint pour finir à 5 secondes. Ca peut paraître court, surtout lorsque l'on hésite à se soigner ou attaquer, souvent on panique et on rage, mais c'est si bon. Précisons que le changement de niveau et de classe ne peuvent se faire que dans un temple, accessible à partir de certains points de sauvegarde, il ne faut donc pas oublier de passer voir le prêtre afin d'augmenter sa puissance.
![]() |
D'un point de vue musical, Baten Kaitos est aussi une tuerie. Tri Crescendo oblige, Motoi Sakuraba a composé la musique du jeu, et je dois dire qu'il s'est surpassé ! Déjà très bon lors de son travail sur Star Ocean 3, il monte encore d'un cran pour nous livrer une œuvre magnifique, poignante. En plus des mélodies de toute beauté, Saku a composé pour Baten Kaitos le meilleur thème de combat et de boss jamais entendus. Entraînants, captivants, ces thèmes sont parfaits, on ne se lasse à aucun moment de les entendre, même lorsque les combats s'éternisent (certains durent jusqu'à une demi-heure). La palme revient à la musique de fin (7 minutes sur l'OST, que je vous recommande bien évidemment) qui arrive à exprimer à elle seule toute la force du jeu et la magie de la scène. Du grand art, merci Mr Sakuraba.
Un RPG Old Scool avec la technique d'aujourd'hui, un système de combats passionnant et novateur, ainsi qu'une composition musicale titanesque, voila ce qu'il faut retenir de Baten Kaitos. Le plaisir que procure se jeu est énorme et assez long qui plus est. Comptez entre 60 et 70 heures pour finir le jeu, 10 de plus pour remplir les nombreuses quêtes annexes (magnus de quête à ammener aux différents personnages non joueurs, plusieurs générations de familles à retrouver, un musée à remplir, des animaux à réferencer, etc). Deux Cds bien remplis, mais on aurait aimé avoir des boss cachés surpuissants, des donjons remplis d'ennemis difficiles et autres challenges corsés, car le dernier boss étant l'ennemi le plus dur du jeu, ça fait léger quand même. Mais bon ce petit défaut reste mineur comparé à toutes les immenses qualités du soft, qui arrive sans mal à se hisser parmi les meilleurs RPG toutes consoles confondues. Le jeu qui vous fera acheter une console GameCube.
Zeus
Concepteurs | Editeur | Machine | Version testée | Difficulté |
Monolith Software & Tri-Cresendo |
Namco | GameCube | PAL | Moyenne |
![]() |
![]() |
![]() |
![]() |
Réalisation | 19/20 | Le plus beau RPG jamais créé. Des détails, des couleurs, des animations, rien n'est négligé, tout est mis en avant pour flatter l'oeil. |
Jouabilité | 17/20 | Le système de combat est un vent de fraicheur dans le genre, on s'amuse à sortir des combinaisons de cartes toujours plus folles. L'exploration est assez basique, mais son interêt est constamment renouvelé grâce aux magnus de quête. |
Musiques | 19/20 | Sakuraba a encore frappé, les thèmes sont boulversants lors des scènes fortes, et entrainants pendant les combats. |
Durée de vie | 17/20 | L'aventure principale est assez longue (60 heures) et les quêtes annexes bien présentes, mais on aurait aimé des boss et donjons cachés. |
Scénario | 16/20 | Il se révèle au final passionnant, avec un background et des personnages très travaillés. Mais le premier cd est assez plat et les situations prévisibles. |
Plaisir de jeu | 18/20 | Un plaisir de jeu immense, surtout pendant les combats mais aussi lors de la découverte des motivations et des histoires liées à chaque personnage. On est tour à tour surpris, émus et joyeux de voir de si belles choses. |
|
|
Note Globale | 18/20 | Le plus grand RPG de la GameCube, et un des meilleurs de tous les temps. |
Revenir en haut |
Découvrez d'autres articles et tests de jeux vidéo ! |